0 mm de pluie, une situation catastrophique. Un climat sec, ensoleillé et chaud qui persiste, et l’impossibilité d’arroser faute d’eau. Je vais perdre 25 % de rendement sur 60 hectares. Ce scénario récurrent va s’aggraver. Cette carte montre l’évolution de l’indice de sécheresse des sols entre 1970 et 2055, selon Météo France. Les sols seront de plus en plus secs. Sans eau, pas d’agriculture possible. Comment continuer à cultiver et se nourrir ?
Voyons d’abord ce qui se passe avec le climat. La sécheresse accrue n’est pas forcément due à une baisse des précipitations, mais à une hausse des températures depuis trente ans en France. La dernière décennie a enregistré plus d’un degré au-dessus de la moyenne entre 1961 et 1990. Plus l’air est chaud, plus il nécessite d’eau pour son équilibre, augmentant ainsi l’évaporation des sols. De plus, les précipitations ont tendance à se concentrer en hiver, avec des épisodes de pluie intense, accentuant les périodes sans pluie et les vagues de chaleur. Cela menace notre production alimentaire.
Des chercheurs ont calculé que les pertes agricoles liées aux vagues de chaleur et aux sécheresses ont triplé en Europe ces cinquante dernières années, passant de 2 % à 7 % entre 1991 et 2015. Que faire pour limiter ces pertes ? Seulement 5 % des agriculteurs pratiquent l’irrigation, tandis que 95 % dépendent de la pluie. Avec la sécheresse croissante, l’irrigation devra se développer, nécessitant des réserves d’eau comme les cours d’eau, barrages ou nappes souterraines alimentées par la pluie. Mais quand il ne pleut pas longtemps, ces réserves s’épuisent.
Pour contourner ce problème, on construit des retenues d’eau remplies en hiver pour irriguer en été. Dans les Deux-Sèvres, une dizaine de retenues sont à l’étude mais controversées pour deux raisons : maintenir les nappes souterraines à un niveau bas toute l’année fragilise les milieux aquatiques comme le Marais-Poitevin; et ces installations favorisent une agriculture gourmande en eau.
Un protocole d’accord inédit en France engage les agriculteurs bénéficiaires des retenues à adopter des pratiques respectueuses de l’environnement, notamment l’agriculture de conservation des sols. Florence Richard pratique cette agriculture sur une centaine d’hectares avec trois piliers : le couvert végétal, la rotation des cultures et le non-labour.
Le couvert végétal consiste à maintenir des plantes dans les champs presque toute l’année pour abaisser la température des sols et limiter l’évaporation de l’eau. La rotation des cultures lutte contre les mauvaises herbes en perturbant leur développement. Le non-labour évite de retourner la terre pour préserver les micro-organismes et améliorer la structure verticale du sol, facilitant ainsi l’infiltration et la rétention de l’eau.
Ces pratiques augmentent la résilience face au changement climatique tout en stockant du CO2 dans le sol. On estime qu’elles pourraient compenser 6 à 7 % des émissions françaises annuelles de gaz à effet de serre pendant trente ans.
Cependant, seuls 5 % des surfaces agricoles françaises adoptent cette démarche exigeante en observation et adaptation locales. Pourtant, elle augmente la résilience agricole tout en atténuant le changement climatique.